lundi 12 octobre 2015

Le fameux concert du fameux Hubert-Félix Thiéfaine.

Pour ceux qui me suivent depuis l'époque de mon ancien blog, vous n'êtes pas sans savoir que je voue un quasi-culte à Hubert-Félix Thiéfaine et à ses morceaux tantôt agressifs, tantôt mélancoliques, souvent teintés d'humour noir ou déjanté. Cela faisait désormais presque cinq ans que je souhaitais assister à une de ses représentations sur scène, bavant devant les nombreux extraits de concerts que j'avais pu en voir, me faisant la réflexion que ça devait quand même bien déchirer en direct. Et puis, le 26 décembre dernier, j'ai appris un peu par hasard qu'il se produisait à Tours, au Vinci, pour la sortie de son nouvel album Stratégie de l'inespoir. Ni une ni deux, j'ai réservé ma place au sixième rang pour le 11 octobre. C'est donc avec le plus grand enthousiasme qu'hier soir, je m'y suis rendue, toute surexcitée de réaliser enfin ce rêve de longue haleine.


Je disais ailleurs l'autre jour que je m'intéressais clairement à la scène masculine française (enfin, pas n'importe laquelle non plus), et j'admets tout à fait que ce soit mon truc. J'ai découvert Thiéfaine un peu par hasard, sur l'auto-radio d'une gentille dame qui m'avait prise en stop alors que je partais de chez mes parents de manière plus ou moins anarchique ; je m'étais renseignée sur l'artiste dès mon retour chez moi deux jours après. Par la suite, j'avais découvert assez rapidement la totalité de ses albums, que j'ai rapidement pris le pli d'écouter en boucle jusqu'à m'imprégner de la mélodie ou des textes avec précision. Connaître par coeur la moitié du répertoire s'est d'ailleurs avéré bien utile durant ce concert particulièrement animé.


Cette soirée m'a donc confirmé, si besoin en était, que j'aime énormément Thiéfaine. Il est très agréable de voir la scène représentée autrement que par le prix du billet et un déroulement orchestré au millimètre près. Oui, ceci est une remarque parfaitement généraliste, mais citez-moi plus de cinq artistes qui n'hésitent pas à être parfois dans l'improvisation totale et qui proposent autant de chansons supplémentaires que le public le demande. Vraiment ça fait du bien, vous n'avez pas idée. A ce propos, mention spéciale au manque d'amabilité du personnel du Vinci, m'ayant contrainte de céder mon appareil photo à la consigne sans même un "bonsoir", "s'il vous plaît" ou "bonne soirée" (eh oui, il faut croire que le palais des congrès ne leur refait pas leur éducation) ; sans oublier les vigiles qui rabrouaient systématiquement les spectateurs qui s'agitaient un peu trop sur leur siège au début du spectacle. Tout ceci m'avait passablement enragée et menaçait même de me gâcher un peu le plaisir, mais c'était sans compter sur Thiéfaine lui-même qui, au bout d'un quart d'heure, a demandé à toute la salle de se lever et de chauffer davantage l'ambiance. Et c'est ainsi que j'ai passé la totalité du concert accoudée sur le devant de la scène, juste à côté des enceintes. Autant dire que c'était une vraie tuerie, y compris pour mes oreilles et mes cordes vocales, qui ont été un peu mal en point ce lundi.

On peut raisonnablement dire que les morceaux choisis résumaient plutôt bien la carrière globale de Thiéfaine, les chansons les plus récentes laissant ensuite place à d'autres, plus anciennes, plus méconnues, plus incisives aussi. J'ai eu la bonne surprise d'y redécouvrir des textes que j'apprécie tout particulièrement, et auquel le live a apporté une autre saveur, plus mordante et plus énergique. Ces nouvelles versions ont donc tenu toutes leurs promesses : du bon rock qui tâche, des instants plus mélancoliques, le tout repris par un public au bord de l'hystérie (les tourangeaux n'étant pourtant pas réputés pour leur sens du festif). Et parmi mes petites préférées, nous avons donc eu le droit à :




Comme vous pouvez le constater, nous avons été bien gâtés durant ces 2h30 ininterrompues. Aucune fausseté, jamais, une folie complètement exacerbée et assumée, une originalité qui m'a transcendée tout du long. Du rock incandescent, tranchant et expressif comme j'aime ; une plume parfois révoltée, parfois provocatrice, comme on n'en fait plus vraiment de nos jours. J'ai également été fascinée par la gestuelle assez particulière de Thiéfaine, très marquée, quelquefois un peu étrange, et qui apportait un effet hypnotique supplémentaire à ce qui se déroulait sur scène. Je ne vous cache pas que j'ai été ravie de pouvoir capter tous ces petits détails que je n'aurais pas forcément pu observer de ma place initiale.


J'eus également le plaisir de retrouver dans cette aventure Alice Botté, guitariste et ami de longue date d'Hubert-Félix Thiéfaine. J'avais été transcendée par ses soli interminables durant les live de Bashung (un autre de ses fidèles amis, et un autre de mes chanteurs favoris), et ce fut une très bonne surprise de le retrouver sur scène à quelques mètres de moi, pour profiter pleinement de son talent. J'ai d'ailleurs remarqué une petite similitude entre les orchestrations de Bashung et celles de Thiéfaine, lesquels cultivent ce même côté sombre et ironique, appuyé par la patte assez reconnaissable d'Alice. Celui-ci fut largement ovationné à la fin du concert, tant son énergie folle-dingue irradiait la scène. Le second guitariste qui complétait le trio de tête était le digne fils de Thiéfaine, Lucas, que je n'ai malheureusement pu apercevoir que de loin, puisqu'il se situait à l'autre extrémité du plateau. Ceci dit, cette complicité père/fils très palpable ajoutait un petit bonus à l'ambiance déjà très familiale qui régnait dans la salle entière. J'étais ravie de noter la proximité entre le chanteur et ses instrumentistes, placés directement à côté de lui, et non planqués dans le fond comme lors de la plupart des concerts. Cet ensemble était donc très harmonieux, bien loin de l'idée reçue qui veut que l'artiste renommé éclipse la vedette à ses musiciens. Les interactions avec le public étaient également nombreuses (j'ai trouvé assez fort qu'il se souvienne être passé dans une petite salle de Joué-lès-Tours vingt ans auparavant), ce qui fait que tout à chacun avait véritablement l'impression d'être chez soi, sur une planète à part, presque secrète, simplement partagée le temps d'un concert.


Toute la troupe a fini par nous réserver cinq rappels, et donc cinq chansons supplémentaires pour boucler la soirée, en nous invitant à chanter le morceau que nous souhaitions pour terminer. Si c'est pas génial, ça. Ah vous voulez La fille du coupeur de joint ? Aucun problème. Et puis vous voulez Des adieux en version acoustique ? Très bien, vous l'aurez aussi.


Un grand bravo à Thiéfaine et à toute l'équipe, qui semblaient tous très émus de l'accueil réservé par les jeunes, les moins jeunes, les fans de la première heure et les nouveaux venus. Une belle soirée que je ne risque pas d'oublier de sitôt, et que je risque bien d'avoir envie de revivre à la sortie du prochain album !

2 commentaires:

  1. C'est toujours plaisant de ne pas être déçu par un artiste qu'on affectionne et de découvrir qu'on a encore plus de raisons de l'apprécier. Très heureux pour toi. Si je me sens pas très sensible de prime abord à sa musique, je reconnais qu'en prenant le temps d'écouter les mélodies font leur effet et il y a un mélange assez plaisant de rage, de dénonciation et de poésie voire d'onirisme. Je ne comprend pas grand-chose aux images et allusions (me manque le dico HFT) mais paradoxalement c'est le genre de textes que je suis le premier à défendre et même à écrire surtout maintenant. Et puis depuis que Renaud n'est plus au premier plan, des artistes comme ça c'est encore plus inestimable. Pour ce qui est de la fille du coupeur de joints, je la connais bien aussi celle-là (spéciale dédicace à ma soeur Lado qui l'écoutait en boucle dans sa jeunesse :-)

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    1. Je ne m'attendais pas vraiment à être déçue, cela dit, surtout quand on connaît un peu le personnage. ;) Il m'a également fallu du temps pour apprendre à apprécier certains albums un peu spéciaux, très différents de ce qu'on peut entendre habituellement sur la scène française (même indépendante). C'est vrai que des artistes engagés manquent un peu de nos jours, ou sont très largement passés sous silence par les médias (c'est notamment le cas de Saez, Melissmell, ou encore Thiéfaine lui-même, puisqu'il a été banni de la plupart des émissions télévisuelles ou radiophoniques. On se demande bien pourquoi ...)

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